Ciron Hervé

Monnayage Antipolitain

, by Jean-Michel Colas

Thèse de doctorat soutenue en 2022
Direction : Georges Depeyrot
École doctorale : ENS, ED 540

Contacter Hervé Ciron

Intitulé de thèse :
Le monnayage Antipolitain (Antibes, Alpes-Maritimes) et des cités voisines


Argumentaire de la thèse :

Notre projet plonge ses racines dans un lointain article de presse, portant lui-même ce titre. Par la suite, Daniel Bretchaloff, Conservateur du Musée de Fréjus, m’ouvrait l’ensemble du corpus des monnaies antipolitaines, provenant des sites du département. Cet ensemble de données fournissait une base ouvrant une perspective quantitative, avec plus de 1200 exemplaires, de qualité fort inégale puisque provenant d’un milieu favorable aux corrosions... Mais le terme d’étude d’une production monétaire pouvait être envisagé pour Antipolis. Évidemment, en matière d’épigraphie numismatique, les lectures divergent parfois, et nous devions publier séparément nos travaux en 1986 .
Ce premier travail nous avait montré que si une large base quantitative est fondamentale en matière de statistique numismatique, il restait évident que l’approche traditionnelle (collecte des spécimens) devait être poursuivie, parce que trop de légendes restaient à l’état de traces. Mais désormais, plus d’abondantes moissons ; restait, et reste encore, la longue quête des collections, publiques et privées, susceptibles de fournir les exemplaires, sinon beaux, du moins lisibles, interprétables épigraphiquement, susceptibles de compléter ou seulement confirmer les légendes monétaires ou les styles de gravure.
 
État des connaissances :
 
À l’issue de la première offensive Césarienne en Espagne, Massalia capitulait. Mais il nous apparaît pourtant clairement que César n’a pas systématiquement cherché à dépouiller totalement les Massaliètes de leur domaine, dès leur reddition.
Dans l’histoire d’Antibes, il est un personnage très important, le triumvir M. Lépide. En effet, les petits bronzes portent au revers, l’abrégé λεπ/λεπι. Comme l’on ne peut accorder de sens particulier à cet abrégé, en grec, la tradition y a lu le nom de Marcus Aemilius Lepidus.
Le choix des images monétaires, au droit un buste à droite et au revers Victoria Tropaeum Coronans, complétés de légendes monétaires que l’exiguïté du flan monétaire a réduites en abrégés. Cependant, depuis 1986, existe un consensus sur le sens global à accorder à ces abrégés. La majorité sont manifestement des débuts de noms typiquement grecs, par exemple ΔΗΜ, ΙΣ, ΠΑΡ, ΔΗ, ΑΝΤΙ et d’autres apparaissent Romains, comme D.Kop.
Toutefois, reste à savoir à quel titre ces personnages apparaissent sur le monnayage, et cela implique au préalable de régler la question du statut de la Cité. Or là règne l’incertitude : Rappelons une opinion émise dans la dernière thèse d’Université sur le sujet : « Si le texte de Strabon IV, 1, 9) est correct, il faut admettre que Antipolis a changé de statut avant le début de l’ère chrétienne », et même « le fait qu’elle soit parvenue dès le règne d’Auguste au statut municipal, inciterait à croire qu’elle a pu être un temps « Ciuitas libera ». Et ces incertitudes demeurent : « ( Antipolis) créée en 43, avec un statut juridique peu clair ». Et à notre connaissance, aucune nouvelle découverte épigraphique n’est venue modifier les données…
La démarche Numismatique peut-elle contribuer à surmonter ces difficultés ? Nous évoquions précédemment la longue méditation sur les « secrets » de ce monnayage ; en fait l’état des connaissances était, paradoxalement, trop avancé pour pouvoir se satisfaire de l’interprétation traditionnelle que nous schématisons ainsi : Antipolis est désormais « Oppidum Latinum », son cadre administratif est calqué sur le modèle Romain, et les Magistratures y sont donc annuelles. La première difficulté tient en ce qu’on ignore le statut juridique de la ville ; certains ont pensé à une Colonie Latine, d’autres à un Municipe ; Les Magistrats ad hoc sont dans le premier cas des Duoviri, et dans l’autre des Quattuorviri.
Mais le nombre ou la position des noms affichés sur la monnaie ne correspondent pas. Peut-on se rabattre sur la solution d’une représentation de la Magistrature monétaire, comme il apparaîtra sur les quadrans Augustéens ? On bute alors sur le nombre variant des noms abrégés sur la monnaie.
Il s’agit pour avancer dans cette recherche de découvrir une certaine quantité de différents d’émission supplémentaires, comme nombre d’indices le laissait espérer dès 1986 ; et en définitive, cette spéculation forcée se révéla en un sens bénéfique puisque nous disposons dorénavant d’un minimum de 29 légendes différentes (plus une reprenant les mêmes noms, mais rangés différemment). Dès lors il nous parait redevenir concevable de suivre l’hypothèse « Romaine » (cadre d’un rythme d’émission annuel – sauf « incidents »- correspondant théoriquement à l’exercice des Magistratures municipales calquées sur le modèle Romain, quel que soit le statut juridique de la ville, Colonie ou Municipe ) ce qui nous conduit pratiquement à la date de la mort de Lépide en 13/12, et en tout cas, après la réorganisation administrative des Gaules en 27 et la réouverture de l’atelier de Rome en 23.
 
Si nous voulons centrer notre thèse sur le monnayage d’Antibes, en le replaçant dans le contexte archéologique et historique, nous voulons aussi replacer ce monnayage dans le contexte régional des émissions de la fin de la République Romaine et du début de l’Empire. Il nous faudra alors étudier les émissions monétaires de l’ensemble des cités situées le long de la côte ligure, gauloise et catalane ainsi que la circulation monétaire dans ces régions.
Nous utiliserons la documentation que nous avons collectée depuis les années 1980, et ce sera l’occasion de produire (enfin) la synthèse générale que nous avons projetée d’écrire sur ce sujet que les fouilles menées depuis des décennies ont complètement renouvelé.