Kouass, Asilah (Maroc)

, par Annick Fenet

Directeurs de la mission : Virginie Bridoux (AOrOc), Mohamed Kbiri Alaoui (enseignant-chercheur, INSAP Rabat)

Cadre de la recherche

Localisé sur la façade nord-atlantique du Maroc à proximité d’Asilah (fig. 1), le site de Kouass a fait l’objet d’un programme de recherches pluridisciplinaires débuté en 2008 et principalement soutenu par le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, l’École française de Rome, l’Institut National des Sciences de l’Archéologie et du Patrimoine de Rabat, l’UMR 8546 (AOrOc, CNRS-ENS-PSL).

Fig. 1 - Localisation du site

Principaux acquis du programme de recherche

L’ensemble des opérations réalisées dans le cadre de la mission (fig. 2) - prospections pédestres et électro-magnétiques, fouilles, analyses topographiques, architecturales et paléoenvironnementales - a permis de renouveler de manière significative la connaissance de cet établissement notamment connu depuis les travaux de M. Ponsich dans les années 1960 pour avoir été un important atelier de potiers d’époque maurétanienne dédié à la fabrication d’amphores et d’objets en céramique caractéristiques des régions de l’Extrême Occident, dites aussi productions du « Cercle du Détroit » (céramiques de « type Kouass », céramiques peintes, céramiques communes, amphores phénico-puniques).

Fig. 2 - Plan général du du site

Cet établissement maurétanien, qui s’élève sur un plateau situé à environ un kilomètre du littoral, s’avère plus étendu qu’on ne le pensait, occupé du tout début du Ve siècle aux années 30 av. J.-C., et correspondre à une agglomération dotée d’une trame urbaine précoce - dès les Ve-IVe s. av. J.-C. (fig. 3) Celle-ci est bien attestée par l’existence de monuments publics, de voies de circulation et d’espaces dallés, d’îlots constitués de pièces principalement rectangulaires dédiés à l’habitat et aux activités commerciales et artisanales, parmi lesquelles la métallurgie semble avoir également tenu une place.

Trois grandes phases ont été identifiées :

  • Phase maurétanienne ancienne (Ve-IVe s. av. J.-C.)
  • Phase maurétanienne moyenne (IIIe-IIe s. av. J.-C.)
  • Phase maurétanienne récente (Ier s. av. J.-C.).

Fig. 3 - Quartier sud-ouest de l’agglomération maurétanienne

L’agglomération, dont on ignore le nom antique, est intégrée dans les circuits économiques et culturels méditerranéens comme en témoignent non seulement les données architecturales et urbanistiques, le mobilier céramique et amphorique d’importation, mais aussi une parure de bijoux de tradition phénico-punique d’une valeur exceptionnelle exhumée dans un niveau d’occupation domestique (fig. 4). Ces éléments font de Kouass un site-clé pour la connaissance de la Maurétanie avant son annexion par Rome tout autant que celle de l’aire économico-culturelle dite du « Cercle du Détroit ».

La réoccupation du site à l’époque médiévale a été bien documentée pour la période des XIIe-XVe siècles (en particulier sous les Mérinides). Sa densité est révélée par la découverte d’un grand nombre de fosses-dépotoirs sur l’ensemble du site, comprenant un riche mobilier, et celle de deux niveaux d’occupation successifs dans certains secteurs. L’établissement médiéval pourrait s’identifier à Nebroch, un bourg mentionné par El-Bekri, peuplé par les Louata (El-Bekri, trad. De Slane, 1913 : 221, Autre route de Basra à Fez).

Fig. 4 - Éléments de parure de Kouass

L’époque romaine n’est représentée que par deux types de vestiges, signalés dès les années 1960 à proximité immédiate du littoral : ceux d’un aqueduc rural qui a bénéficié d’une analyse spatiale et architecturale dans le cadre de la mission et ceux de bassins de salaison localisés en 2012 sous la végétation côtière. La documentation nouvellement acquise a donné matière à réflexion sur la restitution et la fonction de l’aqueduc, vraisemblablement lié à l’existence de ces bassins.

Dans l’optique de la publication des résultats sous la forme d’une monographie, les membres de la mission travaillent actuellement sur l’analyse et la synthèse de l’ensemble des données recueillies lors des différentes missions de terrain qui ont été effectuées depuis 2008.

Principaux collaborateurs de la mission archéologique

  • Encadrement de la fouille et du traitement du mobilier

BIAGI Solange, enseignante, Alès, France
BRAHMI Néjat, chercheuse associée à l’UMR 8546 AOrOc, CNRS-ENS-PSL, Paris, France
DRIDI Hédi, professeur d’archéologie, univ. de Neuchâtel, Suisse
HASSINI Hicham, conservateur du site archéologique de Lixus, Maroc
GRISONI Emeline, chercheuse associée à l’UMR 5608 TRACES, Toulouse, France
ICHKHAKH Abdelfattah (†), ancien conservateur principal des monuments et des sites d’Essaouira-Mogador, Maroc
JULLIEN Thierry, chercheur associé à l’UMR 7298, CNRS-LA3M, univ. d’Aix-Marseille, France
LENOIR Éliane, retraitée, ancienne chargée de recherche à l’UMR 8546 AOrOc, CNRS-ENS-PSL, France
NAJI Halima, conservatrice à la division d’inventaire et de documentation du patrimoine, Direction du Patrimoine culturel, Rabat, Maroc

  • Topographie et études architecturales

ALILOU Mohamed, dessinateur-topographe, Ministère de la Culture, Maroc
ANDRE Nathalie, architecte - ingénieure de recherche à l’USR3155 IRAA/CNRS-AMU, France

  • Étude archéozoologique

CLAVEL Benoît, chargé de recherche au CNRS, UMR 7209, Muséum national d’Histoire naturelle, Paris, France